De la cartographie des océans aux flotteurs Argo : comment augmentons-nous nos connaissances d'un océan en changement?
Date de publication: 08/04/2022 - 10:21De meilleures données sur les océans peuvent être utilisées pour éclairer toute une série de décisions, de la préparation aux tempêtes à la culture des algues. Dans le cadre de la Monaco Ocean Week, l'OHI, Argo et le Laboratoire océanographique de Villefranche ont organisé un événement public qui a donné un aperçu de certains des travaux réalisés afin d'améliorer notre connaissance de l'océan, depuis l'idée originale du Prince Albert Ier de Monaco de cartographier l'océan jusqu'au programme Argo, un projet multidisciplinaire mondial et passionnant.
Les flotteurs Argo fournissent des informations précieuses sur des paramètres tels que la température et la salinité dans toute la colonne d'eau. Cela permet de connaître le profil de température "réel" de l'océan à différentes profondeurs, et pas uniquement en surface. Ces informations sont importantes pour de nombreuses disciplines, notamment pour la préparation aux tempêtes : les tempêtes et les ouragans sont alimentés par la chaleur stockée dans l'océan. Plus la chaleur est importante, plus la tempête est puissante. Grâce à ces mesures qui ont commencé en 1999, on peut constater de manière très claire que depuis 2015, l'océan se réchauffe jusqu'à 2000m de profondeur. Ces données peuvent contribuer à améliorer les prédictions relatives à l'intensité des ouragans, ce qui permet aux communautés d'être mieux préparées à de tels événements. Étant donné que les océans sont le principal puits de chaleur de notre système climatique, Argo suit également le taux de réchauffement de la Terre, une mesure essentielle pour comprendre le changement climatique actuel et futur et l'élévation du niveau de la mer
Les participants à la conférence ont pris connaissance d'un nouveau projet Argo visant à fournir des données sur la profondeur de la mer. Pendant leur déploiement, les flotteurs Argo touchent souvent le fond de la mer et enregistrent le moment où cela se produit. L'OHI a lancé un projet d'essai au CSIRO en Australie, financé par le Service hydrographique australien, pour déterminer si des données de profondeur précises et fiables peuvent être extraites de ces enregistrements. Sur les 2,7 millions de profils de données collectés, une première analyse montre que jusqu'à 8 % d'entre eux pourraient être des échouages : cela pourrait révéler 216 000 nouvelles mesures de profondeur dans le monde entier. L'essai a déjà fourni de nouvelles données en mer de Norvège et en Nouvelle-Zélande, avec une excellente précision médiane de 7 ou 8m. On compte actuellement 3959 flotteurs Argo opérationnels dans le monde.
Une autre innovation qui a été présentée lors de la conférence est le flotteur Argo à recharge thermique équipé d'un échosondeur, le premier flotteur spécifiquement conçu pour la bathymétrie.
Si, à l'origine, la cartographie des océans visait principalement à améliorer la sécurité de la navigation, les données marines sont aujourd'hui utilisées pour étayer la prise de décisions dans un large éventail de disciplines, notamment comme données de base pour suivre les effets du changement climatique ou pour développer l'économie bleue. Des données de qualité peuvent être utilisées pour des projets d'énergie marine renouvelable, pour la pêche et l'aquaculture, pour améliorer les modèles climatiques, etc. Pourtant, nous disposons actuellement de cartes de haute qualité pour environ seulement 20 % de l'océan. Pour remédier à cette situation, l'OHI a lancé plusieurs initiatives visant à améliorer les connaissances, notamment un projet participatif dans le cadre duquel les navires appartenant à des particuliers sont invités à fournir des données collectées à l'aide de leurs instruments de navigation respectifs et enregistrées avec des enregistreurs de données peu coûteux.
“En mer, chacun d'entre nous peut jouer un rôle dans l'amélioration de la connaissance de l'océan : en facilitant le partage des données, la science est renforcée, la sécurité s'améliore et nous parvenons tout simplement à en avoir une meilleure compréhension.”
Dr Mathias Jonas, Secrétaire général
La conférence a également débattu de la dernière génération de flotteurs Argo, appelés Deep Argo, qui peuvent atteindre des profondeurs de 6000 m et sont équipés de multiples capteurs qui permettent de suivre la chimie de l'océan et l'écologie du plancton. Elle a été organisée par l'OHI et l'équipe de pilotage d'Argo en partenariat avec le bureau du projet Argo (www.argo.ucsd.edu) et le Laboratoire océanographique de Villefranche (LOV/CNRS).
“Il est urgent de mieux comprendre l'évolution des océans de la planète. Nous avons fait de grands progrès, mais il y a encore beaucoup à faire”.
Susan Wijffels, de la Woods Hole Oceanographic Institution
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